Vieux gréements
Ma remarque sur ma préférence des bateaux à voile n'a pas laissé un certain nombre d'entre vous indifférents...
Possesseur d'un permis mer me permettant de piloter des bateaux à moteur, j'ai souvent des difficultés à vibrer pour eux, sauf les vibrations du moteur, bien sûr. Et pourtant, curieusement, si les bateaux à voile de compétition, voire la plupart des bateaux à voile modernes me plaisent, ils ne m'enchantent pas toujours.
En répondant à un mail sur ce sujet à une amie, j'ai compris par hasard pourquoi ces différences, pour moi en tous cas. La fantaisie me prends de vous en faire part. Tant pis pour vous qui attendiez une ou plusieurs photos ! Je reprends à peu près le texte de mon mail (mon amie me le pardonnera, j'en suis sûr).
Comme pour toutes les vieilles choses, la patine du temps arrondit … les angles.
Les expériences de la vie, les tempêtes traversées, les blessures et leurs cicatrices, toutes les joies qui laissent leurs rides au coin des yeux, toutes les peines qui laissent leurs rides au coins des lèvres, donnent aux visages et aux gréements une expression d’étrange sagesse, de voluptueuse sérénité, de regard tourné vers le lointain extérieur et vers le profond intérieur. On n’apprend pas à un vieux singe à faire des grimaces, parce qu’elles sont déjà gravées sur la figure.
Un vieux gréement passera la tempête en finesse, en chaloupant un tango langoureux et félin avec les vagues, en craquant de toutes ses vertèbres sous les coups des vagues. Il partira peut être dans tous les sens, mais il tiendra bon. Des générations d’hommes ont précédé et conseillé son artisan dans l’élaboration de ses courbes, guidé son regard et sa main. Le vieux gréement est le résultat d’innombrables heures de discussion entre constructeurs et charpentiers, voiliers et navigateurs, rescapés de naufrage et sauveteurs…
Les gréements actuels sont élaborés par des ordinateurs, insensibles par nature, qui prennent en compte l’histoire de toute la navigation passée par paramètres mathématiques ou statistiques interposés ; une âme ? à la rigueur celle qui leur viendra de leur skipper, ou de leurs périples… ils naissent sans âme définie. Ils naissent communs, à la chaîne, ou au contraire tendus comme des arcs de compétitions, toujours à la limite. Et ils cassent, souvent, comme tout ce qui est conçu pour la course pour laquelle les calculs poussent les efforts à l'extrème…
Les vieux gréements me font rêver, remonter le cours du temps…
Mais aussi les bateaux à moteur qui bossent, qui rament, qui ne sont pas là pour faire joli et sortir une ou deux fois l’an… (cf la serie sur la mer)
En fait, avec les bateaux plus récents, ce que j'aime c'est la mer !
Tiens, en voilà du gréement tout neuf...